mardi 17 avril 2012

À Otjivero en Namibie, le revenu minimum garanti a 2 ans

Un bon bilan, mais une expérimentation bloquée...



Source : MTM

Deux ans après le lancement du projet pilote sur le revenu minimum garanti dans un petit village du centre de la Namibie, l’heure est au bilan.
Chaque mois, les habitants reçoivent € 10, sans conditions contraignantes. « Le bilan est vraiment positif », se réjouit, Herbert Jauch, responsable du programme et représentant de la coalition BIG (revenu de base). La Namibie fait partie des pays où la disparité de revenu est la plus forte.

Dès 2002, la Commission d’orientation nationale proposait le versement d’un revenu minimum garanti. Le gouvernement ne s’étant pas décidé à se lancer dans le projet, les Églises et les syndicats ont pris les choses en main. Le choix du village s’est porté sur Otjivero, car aucun changement n’était attendu ou prévu (programme de création d’emploi, rentrées financières). Seul l’apport de 100 dollars namibiens par mois et par habitant allait peut-être changer la donne.

Le pari consistait aussi à contrer des préjugés, en donnant de l’argent à des pauvres sans contrepartie. « Nous avons pu observer une chose surprenante. Une femme s’est mise à confectionner des petits pains ; une autre achète désormais du tissu et coud des vêtements ; un homme fabrique des briques. On a vu tout d’un coup toute une série d’activités économiques apparaître dans ce petit village. Cela montre clairement que le revenu minimum ne rend pas paresseux mais ouvre des perspectives », écrit Herbert Jauch dans le journal allemand Franckfurter Rundschau. Ainsi, dans le village, le nombre de personnes vivant au-dessous du seuil de pauvreté est passé de 76 % à 37 %. « Le RMG permet aux régions rurales de se développer », conclut Herbert Jauch. Reste à convaincre le gouvernement namibien.


Source : BIEN


Communiqué de presse de la coalition pour le revenu de base, 1 mars 2012


Pendant plusieurs années, les différentes organisations qui ont formé la collation pour le revenu de base ont demandé au gouvernement namibien d’instaurer un RB (BIG) national. Ces discussions ont commencé dès 2004 et ce n’est qu’à la suite des incertitudes du gouvernement quand à l’efficacité de la mesure proposée que la coalition BIG a décidé de réaliser le projet pilote à Otjivero pour démontrer ses effets dans la pratique. En 2008, le BIG est mis en œuvre, tandis qu’en des études d’impact sont faites en 2008 et en 2009. Ces études montrent qu’un revenu de base très modeste de 100 $ namibiens par personne et par mois a un impact positif. La baisse spectaculaire de la malnutrition des enfants, l’amélioration de la fréquentation des écoles et de la performance scolaire, le recul du taux de criminalité et l’essor nouveau d’activités économiques n’en sont que les signes les plus évidents. Plus important encore, ce revenu de base a également contribué à ce que la population retrouve dignité et confiance en soi. Les quelques 1000 personnes vivant à Otjivero, qui ont reçu ce RB, sont un témoignage vivant d‘une réelle possibilité de faire face à la pauvreté.

En dépit de ces résultats positifs, le gouvernement namibien ne s’est toujours pas engagé pour l’instauration d’un RB en Namibie. Au contraire, les dirigeants du gouvernement ont exprimé des craintes que le RB rendrait la population paresseuse et dépendante de l’aumône. De tels points de vue sont davantage basés sur des préjugés que sur les preuves ressortant de l’expérience d’Otjivero ! Il faut souligner que la coalition BIG a proposé à nombre de Namibiens, y compris des membres du parlement, de visiter Otjivero et d’y observer directement l’évolution de la situation. Cependant, ils ont préféré exprimer leur avis en privé au lieu de soutenir publiquement la proposition d’un RB national.

Il est sans doute nécessaire de rappeler au gouvernement namibien la pauvreté dont souffrent encore beaucoup trop de nos concitoyens. Depuis l’indépendance, la Namibie a instauré différentes prestations sociales, parmi lesquelles les pensions de retraite, des subventions pour les vétérans, des allocations pour orphelins, enfants fragilisés, etc. Ces prestations ont contribué à soulager certains Namibiens, mais beaucoup trop d’entre eux sont restés désespérément pauvres en raison du chômage rampant qui frappe aujourd’hui plus de la moitié de notre population. Il y a quelques mois, les médias ont montré des images choquantes de personnes cherchant de la nourriture dans des dépotoirs. Cela nous ramène à la dure réalité qui marque la vie de nombreux Namibiens : L’opulence et le désespoir coexistent côte à côte et bien peu de chose est entrepris pour éradiquer la pauvreté.

Le revenu de base (BIG) n’est certainement pas la seule mesure à prendre, mais il s’agit d’un point de départ important. Lors de nombreuses discussions avec le gouvernement et des organisations de la société civile dans le pays, la coalition s’est toujours dite prête à supporter des mesures meilleures et plus efficaces pour lutter contre la pauvreté, s’il y en avait. Jusqu’ici pourtant, ceux qui critiquent la coalition BIG n’ont pas été en mesure de présenter une alternative à même de traiter la pauvreté de manière plus complète et rapide que le revenu de base ! La question se pose donc : pourquoi le gouvernement namibien hésite encore à instaurer un BIG, sachant qu’il est finançable, que ses coûts administratifs sont très bas et qu’il touchera immédiatement tous les Namibiens ? Combien de temps allons-nous encore passer à débattre au sujet de la pauvreté au lieu d’agir pour la supprimer ?

Les débats exhaustifs et l’échange des différents points de vue concernant le BIG sont certainement légitimes et constituent aussi un ingrédient nécessaire de toute démocratie. Cependant, après des années de débat à propos du BIG, il n’est plus acceptable de se contenter de lamentations au sujet de la pauvreté alors qu’il est possible de la combattre. L’heure d’agir est venue et nous ne pouvons plus voir des milliers de personnes continuant de souffrir pendant que les politiciens ne parviennent pas à décider ce qui est à faire ! Aussi longtemps que de nombreux Namibiens resteront relégués dans une vie de misère, les fruits de l’indépendance et de la libération seront le privilège d’une minorité. Aussi longtemps que plus de 50% des Namibiens resteront sans emploi et dans la privation, nous ne pourrons annoncer que nous avons atteint nos objectifs. Sommes-nous tout simplement satisfaits par le statu quo ou sommes-nous décidés d’entreprendre des changements plus fondamentaux pour bâtir une société différente, fondée sur l’égalité et la justice sociale ? La réponse à ces questions essentielles déterminera le chemin que prendra notre pays.

Pour des centaines de milliers de Namibiens qui sont toujours piégés dans la pauvreté, les questions de redistribution, de justice sociale et le BIG sont des questions existentielles. Bientôt, ils demanderont des comptes à leurs dirigeants qui aujourd’hui rechignent devant l’instauration du BIG. Un chose est certaine : avec un BIG, personne en Namibie ne serait forcé de fouiller dans les ordures à la recherche de nourriture. C’est pourquoi notre large coalition en appelle une fois de plus au gouvernement namibien pour attaquer la pauvreté de face et introduire un BIG national maintenant !

L’intransigeance du gouvernement concernant le BIG ne perpétue pas seulement la pauvreté en Namibie, mais met aussi en danger la communauté d’Otjivero. Après avoir récolté des fonds pour le projet pilote (2008-2009), la coalition pour le BIG a encore réussi à assurer une allocation de transition pour les années 2010 et 2011. Cependant, nos ressources sont aujourd’hui épuisées tandis que les habitants d’Otjivero font face à la perspective de retomber dans les pires formes de pauvreté qu’ils ont connues avant l’instauration du BIG. C’est pourquoi, au nom de la solidarité humaine et de l’idée du revenu de base (BIG), nous en appelons à l’aide nationale et internationale en faveur de la population d’Otjivero. Nous voulons en premier lieu atteindre nous compatriotes ici, en Namibie : nous vous demandons de soutenir publiquement l’idée d’un BIG national et de faire un don en faveur des survivants d’Otjivero. Le temps est venu de prendre position et de se compter. Nous avons besoin de votre soutien maintenant !

Merci !

 Evêque Dr Z. Kameeta, Président de la Coalition BIG

Aucun commentaire: