Alors que le compostage des déchets reste marginal en France, comme au sein de l’UE, l’association européenne ACR+ vient de publierune étude décryptant les solutions à la portée de toutes les collectivités, en fonction de leurs coûts et de leurs résultats. Mode d’emploi.
L’enquête d’Eurostat publiée
en début de semaine l’a rappelé. Le compostage reste faible dans
l’Hexagone, ne touchant que 16% des déchets municipaux. Pour rejoindre
ses voisins européens, comme l’Autriche (34% compostés), les Pays-Bas
(26%) ou la Belgique (21%), la France a pourtant l’embarras du choix.
L’étude d’ACR+[1] décrypte
les 6 formules favorisant ce mode de traitement, depuis le composteur
de la cuisine jusqu’à la collecte séparée dans l’agglomération. Un mode
d’emploi destiné avant tout aux collectivités, qui ont définitivement
les cartes en main pour réduire l’enfouissement des déchets organiques
sur leur territoire.
UN EUROPÉEN EN PRODUIT 200 KG PAR AN
Selon
les régions, les déchets alimentaires et les déchets verts pèsent de 22
à 49% du poids des poubelles municipales. Dans les régions
méditerranéennes, où l’alimentation est plus riche en fruits et légumes,
les emballages et les encombrants moins nombreux, cette part peut même
atteindre 70% des poubelles.
En moyenne, les déchets organiques représentent 37% des déchets municipaux européens [2].
Un Européen en produit en moyenne 200 kilogrammes chaque année (entre
30 et 90 kg de déchets alimentaires, le reste étant constitué de déchets
verts).
Collectée
et traitée, cette manne permet pourtant de réduire les émissions de GES
(en détournant les volumes enfouis), pour un coût évalué par ACR+ entre
40 et 178 euros la tonne (valeur médiane 82 €/t). A noter que la
gestion des déchets alimentaires s’avère plus élevée que celle des
déchets (70 €/t contre 31 €/t).
A LA MAISON OU DANS LE QUARTIER?
Facile
et rapide à mettre en place, le compostage domestique ou de proximité a
déjà été choisi par de nombreuses collectivités. Ici, une collectivité
distribue gratuitement des composteurs aux familles et les sensibilise.
Ailleurs, un composteur collectif est géré à l’échelle d’un quartier,
d’un village, d’un immeuble. Un phénomène en pleine expansion en France,
avec au moins 200 collectivités selon le Centre national d’information indépendante sur les déchets (Cniid). Ce déploiement reste encore loin des performances réalisées en Allemagne, en Belgique ou en Autriche.
Le
compostage à domicile permet de capter de 50 à 162 kg par habitant et
par an de déchets alimentaires et de 22 à 73 kg/hab/an de déchets verts.
Une solution particulièrement bon marché, puisque le coût médian
s’élève à 32€/t. Plus cher, le compostage partagé revient à environ
93€/t, selon ACR+.
Dans
la région des Flandres, par exemple, 42% des foyers sont aujourd’hui
équipés d’un composteur à domicile. 67% d’entre eux bénéficient par
ailleurs d’une collecte sélective de biodéchets. Résultat: environ
100.000 t de déchets sont détournés, chaque année, des décharges et des
usines d’incinération.
LES DÉCHETS VERTS MIS À PART
La
collecte et le compostage municipal des déchets verts permettent aussi
de réduire l’enfouissement. Pour un coût compris entre 36 €/t et 70 €/t
(compostage compris), cette activité permet de détourner de 60 à 90
kg/hab/an de déchets organiques.
A
Saint-Jacques-de-Compostelle, en Espagne, environ 1.650 t de déchets
verts provenant de jardins publics et professionnels sont collectés
chaque année. Le compost, qui comporte moins d’1% d’impuretés, est
ensuite vendu aux jardineries. Cette solution, qui vise des déchets
spécifiques, peut être associée au développement du compostage
domestique.
LES ÉTABLISSEMENTS SE MOBILISENT
Troisième
formule: le compostage institutionnel. Il s’agit des installations
déployées au sein des écoles, universités, hôpitaux, hôtels,
restaurants, commerces et marchés alimentaires. Les collectes varient
fortement selon les acteurs: jusqu’à 3 t par employé et par an pour les
restaurants, ou jusqu’à 800 t/an pour les commerces.
Logiquement,
les coûts font aussi le yo-yo (entre 55€/t et 237 €/t) avec une valeur
médiane de 94€/t. Comme pour le compostage domestique, environ 72% des
déchets alimentaires peuvent y être compostés. Les déchets de viandes,
de poissons, les graisses et les liquides en sont exclus.
De
nombreuses initiatives existent en Europe. L’école suédoise
Folkhogschool, servant 400 repas par jour, composte désormais 13,5 t de
déchets organiques par an (coût de l’investissement: 13.000 €).
Une
formule alternative lui est associée: le compostage hors-site. Dans ce
cas, l’établissement recourt aux services d’une entreprise extérieure ou
d’une collecte municipale, pour un coût logiquement plus élevé, de 152
€/t. C’est le choix opéré par 4 écoles d’Alban (Tarn), dont les déchets
alimentaires sont collectés par le syndicat intercommunal puis sont
envoyés dans une installation de compostage.
Ces deux formules se développent d’ailleurs en France, en raison de la nouvelle obligation faite aux gros producteurs de collecter séparément leurs biodéchets, en vigueur depuis le 1er janvier 2012.
LA COLLECTE SÉPARÉE GÉNÉRALISÉE AU SEIN D’UNE COLLECTIVITÉ
Comme de nombreuses associations environnementales -dont le Centre d’information indépendante sur les déchets-,
ACR+ préconise la collecte séparée de biodéchets. Efficace pour réduire
largement l’enfouissement des déchets organiques, elle permet de
diminuer les émissions de GES tout en favorisant la production d’un
compost de qualité pour les terres agricoles.
Ce
dispositif permet de collecter de 25 à 145 kg/hab/an de déchets
organiques pour un coût oscillant entre 79 et 272 €/t, et une médiane de
152 €/t. Rarissime en France (elle ne concerne que 3% de la population,
dont l’agglomération de Pau), elle a souffert du développement du
tri-mécano-biologique (TMB), pourtant générateur de compostats riches en
métaux lourds, en verre et en matières plastiques. ACR+ rappelle que le
TMB se résume encore trop souvent en «un pré-traitement avant l’enfouissement». Son coût reste d’ailleurs élevé: entre 140 et 197 €/t.
Ailleurs
en Europe, la collecte sélective des biodéchets a changé d’échelle.
Environ 74% des municipalités espagnoles l’ont adoptée, comme près de
60% des ménages allemands, environ 80% des foyers autrichiens, et 53%
des familles britanniques.
Convaincante,
ACR+ observe que la mise en place d’une collecte séparée des biodéchets
n’augmente pas les dépenses de la collectivité lorsqu’elle réduit la
collecte des ordures résiduelles. En résumé: les ménages doivent aussi
jouer le jeu, en triant leurs biodéchets à la source.
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