mercredi 26 juin 2024

Juliette Rousseau : « La fracture entre la gauche et les ruralités est quasiment totale »

Source : https://reporterre.net/Juliette-Rousseau-La-fracture-entre-la-gauche-et-les-ruralites-est-quasiment-totale


Juliette Rousseau : « La fracture entre la gauche et les ruralités est quasiment totale »

« Les ruralités sont un espace que la gauche ne pense pas, qui ne l’intéresse pas », écrit la militante bretonne Juliette Rousseau. Elle pourrait pourtant s’inspirer des pratiques de « ploucs » pour stopper le RN. 

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Aujourd’hui encore, comme le rappelle la géographe Valérie Jousseaume, la ruralité reste majoritairement perçue comme une forme dégradée de l’urbain.

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Et pourtant, ce « il va bien falloir faire avec » constitue l’une des principales raisons qui m’ont poussée à revenir à la campagne. Avec la solidarité matérielle, les coups de main entre voisins, pratiques si communes aux modes de vies ruraux et qui constituent la base d’un vivre ensemble qui n’a jamais tout à fait disparu.

Paradoxalement, si cela ne fait pas des ruraux des électeurs de gauche, je pense que la gauche gagnerait à s’en inspirer. J’ai toujours cru à la vie partagée, au fait de se rencontrer, de s’organiser avec celles et ceux qui nous sont proches géographiquement. C’est aussi un truc de plouc, de ceux que j’ai envie de me réapproprier pour les revendiquer. Les sciences sociales le désignent par l’expression « effet de lieu », c’est-à-dire une interdépendance et une interconnaissance profondes, liées à un lieu partagé.[...]

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De la ruralité que je connais, j’aime les pratiques d’autonomie, de solidarité, et la défiance vis-à-vis de l’État, comme vis-à-vis des villes ou de ceux qui prétendent nous représenter sans jamais chercher à nous connaître ni nous traiter en égaux. Ces éléments peuvent poser les bases d’un tout autre projet politique. Cela va demander un travail de longue haleine, ainsi que l’instauration d’un rapport de force, tant vis-à-vis de l’extrême droite et de ses idées, que de la gauche et de ses impensés.

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Construire et renforcer les réseaux de solidarité entre et avec celles et ceux que cette vision racialiste du monde met en danger. S’approprier les traditions et les rendre à nouveau vivantes, en mouvement, renouer avec celles que le patriarcat, le capitalisme ou le nationalisme ont effacé et qui peuvent nourrir l’émancipation vis-à-vis de ces systèmes d’oppression. S’attaquer aussi à la question de la production, depuis et avec celles et ceux qui en sont les rouages. Et tant d’autres choses encore.

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Le chantier est immense mais nous avons pour nous la joie de faire avec la matière immédiate des lieux que nous habitons et de celles et ceux avec qui nous les partageons : un savoir-faire et un savoir-être de « ploucs » qui pourrait bien (re)trouver ses propres formes d’expression antifasciste et de libération. 


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